Entrepreneurs, gardez à l’esprit que votre bailleur ne peut pas vous imposer tout type de clauses limitant la cession du bail de votre fonds de commerce.
La Cour de Cassation ne cesse de rappeler ce principe depuis un arrêt de principe rendu le 2 octobre 2002 (Cass., 3ème Civ., 2 octobre 2002, n° 01-02.035).
La cession de fonds de commerce se présente sous un jour très attrayant au regard des implications de la cession d’entreprise. Si celle-ci emporte transmission de l’ensemble du passif, celle-là se traduit par le seul transfert des contrats de travail en cours et des polices d’assurance.
La cession de fonds de commerce semble donc bénéficier d’un avantage comparatif non négligeable.
Toutefois, l’autre visage de la cession de fonds de commerce ne saurait se dérober très longtemps, une fois la lecture du bail à céder entreprise. Le bailleur peut, en effet, inclure dans le bail des limites conventionnelles rendant la cession moins aisée et, par là même, la cession de fonds de commerce moins attrayante pour le preneur.
Le bailleur peut-il pour autant imposer au cessionnaire tout type de clauses limitatives de la cession du bail à l’acquéreur du fonds de commerce ?
L’arrêt du 2 octobre 2002 (Cass., 3ème Civ., 2 octobre 2002) rendu par la Cour de cassation a permis de réaffirmer que l’article L.145-16 du Code de commerce, qui prohibe les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail à l’acquéreur de son fonds de commerce, ne vise que les interdictions générales et absolues.
Une lecture a contrario de cette jurisprudence nous conduit à reconnaître la validité des clauses se bornant à rendre la cession moins aisée.
Dans l’espèce précitée, la Cour a consacré la validité de la clause contenue dans un contrat de bail subordonnant la cession du droit au bail à l’acquéreur du fonds de commerce à un accord exprès du bailleur.
A titre d’exemples, ont été reconnues comme étant valables la clause prévoyant l’intervention du bailleur à l’acte de cession (Cass., Com., 6 mars 1957), l’instauration d’un droit de préemption en faveur du bailleur (Cass, 3ème Civ., 12 juillet 2000), l’engagement du preneur de rester garant solidaire de son cessionnaire (Cass., Com., 27 janvier 1953) ainsi que la clause imposant l’accord du bailleur en cas de cession (Cass., Com., 26 février 1956).
La volonté du bailleur doit donc se couler dans le moule jurisprudentiel.
Non contente d’être enserrée dans un cadre fixé par la haute juridiction, la volonté du bailleur se heurte également à une limitation légale. En effet, les clauses limitatives de la cession du bail à l’acquéreur du fonds de commerce doivent s’effacer devant les dispositions de l’article L.145-16 alinéa 2 du Code de commerce en cas de fusion de sociétés ou d’apport partiel d’actif soumis par les parties au régime des scissions. Dans cette hypothèse, le bail est transmis, sans l’accord du bailleur, nonobstant toute stipulation contraire, à la société issue de la fusion ou bénéficiaire de l’apport. Cette dernière est donc substituée à celle au profit de laquelle le bail a été initialement consenti dans tous les droits et obligations résultant du bail.
Les avantages de la cession de fonds de commerce pour le preneur sont donc bien réels d’autant que l’action du bailleur est doublement limitée par la loi et la jurisprudence.